Guerre de Troie - Prise de Troie - Laocoon
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Cependant les Troyens, ayant passé des bandes de cuir et de fortes chaînes autour du corps du cheval, le traînaient dans la campagne, à l'aide des roues sur lesquelles il était monté. Ils ignoraient qu'il portait dans ses flancs l'élite des héros grecs. Des joueurs de flûte et de luth, rassemblés au-devant de lui, faisaient retentir l'air de leurs concerts. Hélas ! misérables humains, que nos vues sont bornées ! Un nuage épais nous dérobe l'avenir : séduits par de vains transports, nous courons souvent, sans le savoir, à notre ruine. Ainsi le plus terrible fléau menaçait les Troyens, et eux-mêmes allaient l'introduire dans leurs portes. Ils avaient cueilli toutes les fleurs des bords du Simoïs, et ils couronnaient déjà de guirlandes le cheval auquel le destin avait attaché leur perte. 
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Cependant les Troyens avançaient toujours, traînant après eux l'auteur de leur ruine. Les inégalités du terrain et les rivières qu'il fallait traverser leur rendaient le chemin très pénible : malgré ces obstacles, le cheval les suivait aux autels de Pallas ; il semblait s'enorgueillir de ce qu'il devait en être l'ornement. La déesse, frappant de sa main divine la croupe de l'animal, augmentait la rapidité de sa marche : aussi franchissait-il l'espace plus promptement qu'une flèche. Il atteignit aisément ses conducteurs, quelque précipitée que fût leur marche. On ne le vit pas prendre un instant de relâche, jusqu'à ce qu'il fût rendu sous les murs de Troie. Les portes n'étaient pas assez larges pour le recevoir ; mais Junon accourut, et lui en rendit l'accès facile. Neptune, assis au haut des tours d'Ilion, enfonça les portes d'un coup de son trident, et lui en ouvrit l'entrée. Aussitôt les femmes troyennes, accourant des divers quartiers de la ville, se rassemblèrent autour de cette merveille. Les vierges, les jeunes filles dont la main était déjà promise, celles enfin qui joignaient au titre d'épouse celui de mère, toutes exprimaient leur joie par leurs chants et par leurs danses. 
Laocoon (prince et grand prêtre de Poséidon) pensait que Sinon était un imposteur et, leur parlant avec sagesse, disait qu'il soupçonnait dans l'esprit des Achéens une ruse dangereuse ; il les exhortait tous à incendier sans retard le cheval de bois, pour savoir s'il cachait quelque piège.
Laocoon - Tubi - Versailles
Alors intervint Athéna qui fit trembler Laocoon puis le rendit aveugle, les Troyens comprirent qu'il avait offensés les Dieux. Ils soignèrent Sinon dans la ville et s'apprétèrent à rendre hommage à la statue offerte à Athéna par les Grecs.
Laocoon persistait cependant à leur donner des conseils et les priait de jeter le cheval dans un feu dévorant. Athéna appela vers Troie ces serpents horribles ; ils accoururent promptement à l'appel de la déesse ; l'île trembla, la mer résonna sous le poids de leur course, les flots s'entr'ouvraient, et ils s'élançaient, dardant leurs langues. Ils vinrent donc promptement où la déesse les appelait, aiguisant au fond de leurs gueules leurs dents meurtrières contre les fils de Laocoon.

Partout la ville gémissait à l'approche des serpents ; et, tous se pressant en désordre, il arriva que plusieurs furent blessés ; car ils étaient à l'étroit dans les places où ils s'élançaient ensemble. Seul à l'abandon demeura Laocoon avec ses fils, car la Parque funeste et Athéna les avaient rendus immobiles ; les serpents se précipitèrent sur les deux enfants tremblants d'effroi et les dévorèrent de leurs gueules meurtrières ; ils tendaient leurs mains vers leur père, mais il ne pouvait les secourir. 
Terrifiés et certains d'avoir faché les Dieux, les Troyens poursuivirents leurs travaux.
Dans ses entrefaites, Cassandre, agitée par l'esprit prophétique, et ne pouvant plus demeurer renfermée dans son appartement, en avait brisé la porte, et courait au dehors. Telle la fille de Priam, en proie au trait dont elle était déchirée en découvrant un avenir fâcheux, agitait le laurier sacré ; elle remplissait la ville de ses hurlements. Ni ce qu'elle doit au rang illustre dont elle est issue, ni ce qu'elle doit à ses amis, rien ne peut la retenir ; elle a perdu jusqu'au sentiment de la pudeur, si cher à son sexe. 
Ne voyez-vous pas que vos ennemis sont campés dans cette prodigieuse machine ? C'est à cette heure que vont s'accomplir les tristes visions qui ont troublé le repos d'Hécube. Rien ne s'opposera désormais aux efforts de nos ennemis ; ils touchent à l'exécution de leur entreprise, et leurs succès vont terminer la guerre. Ln bataillon de héros grecs est prêt à fondre sur nous, ils n'attendent qu'une nuit obscure pour sortir des flancs où ils sont renfermés, ils brûlent de descendre à terre pour nous livrer combat. Malgré les ténèbres, nous verrons briller le fer homicide levé contre nous. Avec quelle ardeur ces braves guerriers vont s'élancer dans la mêlée ! La déesse qui a conçu le plan de cette machine la délivrera du poids dont elle est surchargée. Je vois déjà les flots de notre sang rejaillir sur nos meurtriers ; ils se repaissent de carnage. Les femmes, enveloppées dans le malheur commun, sont chargées de fers. Un feu dévorant s'est glissé dans nos murs, c'est du sein du cheval qu'il est sorti. Hélas ! malheureuse Cassandre ! hélas ! chère patrie ! tu vas être réduite en poussière. 
Que ce cheval, qui porte tant de héros dans ses flancs, tombe sous l'effort de la hache ; qu'il périsse dans les flammes, et que les Grecs qui s'y sont cachés y trouvent un bûcher digne prix de leur perfidie ! Lorsque vous vous serez ainsi vengés, les festins, les danses, tous les plaisirs vous seront permis, après avoir fait des libations aux dieux qui nous auront rendu la liberté, l'objet de vos voeux les plus doux».
Elle parla ainsi, sans qu'on ajoutât foi à ses discours. Apollon, qui lui avait accordé le don de prévoir l'avenir, avait fait en sorte que personne ne croyait à ses oracles. Priam, qui l'entendit, ne lui répondit que par les reproches les plus amers : «Quelle audace, quelle impudence est la tienne, lui dit-il, et quel mauvais génie te porte encore aujourd'hui à nous annoncer des malheurs ?
Cassandre - Evelyn de Morgan
Dans le même temps, les Troyens, rassemblés dans le temple de Minerve, protectrice de leur ville, étaient occupés à placer sur de riches piédestaux le cheval qu'ils venaient de lui offrir. Le feu consumait les victimes consacrées à la déesse, et ses autels étaient tout fumants de la graisse des sacrifices. Les dieux rejetaient ces hécatombes. On ne voyait partout que festins, on s'abandonnait à une joie effrénée, dont l'excès devenait encore pire par la stupidité que l'ivresse répandait sur tous les esprits. On ne pensait plus à rien, personne n'était à son poste, et l'on ne cherchait qu'un prétexte pour y manquer. Entre ceux à qui l'on avait confié la garde des portes, il y en avait bien peu qui songeassent à y veiller. 
Cheval de Troie - Tiepolo