Guerre de Troie - Prise de Troie - Cheval de bois
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Déjà le jour venant de s'éteindre, la nuit avait couvert Ilion de son voile funeste, lorsque la déesse des amours, toujours habile à imaginer des ruses, ayant pris un ajustement favorable à ses charmes, se rendit auprès d'Hélène ; elle l'appela, et lui parla ainsi : «Chère princesse, lui dit-elle avec douceur, le vaillant Ménélas ton époux, porté dans les flancs du cheval de bois, vient te retirer des mains de tes ravisseurs. Les autres princes grecs, jaloux de l'honneur de partager les périls d'une entreprise dont tu es l'objet, sont renfermés avec lui dans cette fatale machine.
Ne t'inquiète point sur la destinée du vieux Priam ; que le reste des Troyens et Déiphobe lui-même cessent d'occuper ta pensée. Je vais te rendre à Ménélas»
 Elle se rendit au temple de Minerve ; le superbe cheval qui venait d'être introduit sous ces voûtes sacrées l'étonna par l'énormité de sa taille. Elle en fit trois fois le tour. L'esprit occupé des jeunes beautés de la Grèce, elle les nomma toutes à voix basse (on dit même qu'elle imitait leurs douces voix).

Leurs époux, placés dans le ventre du cheval, s'affligeaient au tendre souvenir que leur rappelaient des noms si chéris. Ménélas s'attendrit au son de la voix de la fille de Tyndare, qui vint frapper ses oreilles ; Diomède versa des pleurs en entendant nommer Egialée, sa tendre épouse ; le nom de Pénélope produisit la même émotion dans l'âme de son cher Ulysse. 
Comme elle se disposait à sortir du temple, Athéna lui parla ainsi : "Malheureuse, lui dit-elle d'un ton qui la fit trembler, jusqu'où doivent t'emporter tes folles ardeurs ? Quand cesseras-tu de soupirer après de nouveaux amants ? Les feux impudiques qu'Aphrodite allume en ton sein ne s'éteindront-ils donc jamais ? 
N'es-tu point touchée de la constance de ton premier époux, et l'éloignement de ta fille Hermione ne te cause-t-il aucun regret ? Tiendras-tu toujours le parti des Troyens ? Fuis loin de ces lieux, retourne au palais de Priam, et du haut de ses tours montre aux Grecs le chemin que leurs vaisseaux doivent tenir pour leur retour, en faisant briller à leurs yeux des flambeaux allumés".
Tandis que cette princesse s'acheminait vers le palais, les Troyens, accablés de lassitude, avaient cessé de danser pour se livrer au sommeil. Ils ne faisaient plus résonner leurs instruments de musique. Ceux-ci, fatigués des excès de la table, s'étaient endormis la tête penchée sur leurs verres, pendant que ceux-là, cherchant à saisir leurs coupes remplies de vin, les laissaient échapper de leurs mains débiles.

Le repos, compagnon de la nuit, versait sa douce influence sur les mortels ; les chiens même, suspendant leurs aboiements, semblaient craindre de troubler ce silence. Le calme qui régnait dans la cité allait devenir le signal du carnage. Déjà le maître des dieux, qui dispense la victoire à son gré, avait fait pencher sa balance en faveur des ennemis des Troyens ; la perte de ces derniers était assurée. Apollon ne pouvait plus frapper les Grecs de ses traits. Affligé de la ruine prochaine des murs sacrés d'Ilion, il sortit de leur enceinte, et se retira dans un superbe temple que les Lyciens lui avaient bâti.
Cheval de Troie - Gravure Hélène - Gustave Moreau